Une concentration en arsenic sept fois supérieure au seuil
Ce rapport inédit a été rédigé en 2018 par Geoderis, le bureau d’expertise public spécialisé dans l’après-mine. D’après ses conclusions, le secteur où Imerys explore actuellement les sous-sols est classé « E », le plus haut niveau de pollution minière du pays. Pourtant, trois ans après la publication du rapport, en 2021, le permis d’exploration délivré à Imerys a été renouvelé… sans encombre. À la manœuvre : Agnès Pannier-Runacher, alors ministre déléguée à l’industrie. Contacté, le ministère de la transition énergétique, qu’elle dirige aujourd’hui, n’a pas souhaité répondre à nos questions.
Dans le bourg d’Échassières, les habitant·es que nous avons interrogé·es assurent n’avoir jamais été informé·es des pollutions aux métaux lourds. Ni par la préfecture de l’Allier, ni par le maire, Frédéric Dalaigre, qui a salué l’annonce du projet dans la presse mais refuse de répondre aux questions de Disclose et IE. Le secteur est pourtant « susceptible de présenter un risque très significatif pour la santé humaine et l’environnement », souligne le rapport de Geoderis.
« Personne ne m’a jamais dit que mon terrain était pollué, témoigne Roger Konaté. Il y a bien un agent qui est venu faire des prélèvements il y a quelques années, mais je n’ai plus jamais eu de nouvelles ensuite ». Pourtant, Geoderis a considéré que son terrain était fortement contaminé aux métaux lourds tels que le tungstène, le lithium, le plomb, le zinc, le cuivre et l’arsenic.
Notre enquête nous a conduit au musée Wolframines, qui relate l’histoire du bassin minier. « Le monde fascinant des minéraux », peut-on lire au-dessus de la porte d’entrée, franchie chaque année par des centaines d’enfants en sortie scolaire.
Ce 29 septembre, ils sont plusieurs dizaines à trifouiller dans un monticule de roche blanche de kaolin issue de la carrière voisine, appartenant à Imerys. Après l’atelier pratique, c’est la pause sandwich sur l’aire de pique-nique attenante au musée. Un terrain « impacté » à l’arsenic, au tungstène et au lithium, souligne le rapport de Geoderis. Alors que les experts ont recommandé que soit spécifiée la présence d’un ancien site minier sur place, rien n’a été fait. Il n’est pas non plus indiqué, comme le préconise le rapport, la nécessité du lavage des mains des enfants. « Ça ne se bouscule pas énormément dans ce musée », ose la préfecture de l’Allier pour justifier cette absence d’information. La nouvelle campagne d’exploration d’Imerys prévoit treize forages à proximité du musée.
Dérogations successives
Que se passera-t-il si Imerys creuse dans une terre déjà polluée ? Quid des nappes phréatiques ? Cette question, Nora et Coralie (prénoms d’emprunt), militantes de Stop Mine 03 et Préservons la forêt des Colettes, deux associations locales qui se battent contre l’ouverture de la mine de lithium, se la posent depuis un an. Sans en connaître la réponse. Nous avons donc soumis la carte des pollutions à Laure Laffont, ingénieure géochimiste de l’université de Toulouse. « Certains points à haute teneur en arsenic et quelques-uns de plomb se situent sur le périmètre d’exploration de la mine de lithium, relève la spécialiste des métaux lourds. Il ne faut pas que ces sols soient en contact avec les eaux souterraines ou qu’ils soient remobilisés dans le cadre de nouvelles entrées de galeries».